S’adapter et accepter les changements …

Ça fait maintenant plus d’un mois que je suis officiellement enceinte. J’ai l’impression que c’était il y a des lustres. Chaque matin je regarde la date sur mon réveil et je me dis : « Un jour de gagné. » Je mesure ma chance, même si on est loin du début de grossesse de rêve. C’est difficile pour moi d’accepter de ne pas être à 100% de mes capacités habituelles. Les nausées et les quelques vomissements (associés à ma bonne vieille émétophobie) me freinent dans … tout ! Alors je me répète ce style de phrases : « un jour à la fois », « acceuille les changements », « accepte ce qui est », « le meilleur est à venir » … Spoiler alert : ça ne fait pas passer les nausées ! Mais ça m’aide à relativiser. Je suis une loque parce que je porte la vie et ça c’est cool. J’adore saouler Lucien avec ça : « Je porte la vie ! » C’est ma nouvelle excuse favorite qui justifie tout (surtout manger n’importe quoi à n’importe quelle l’heure).


À ceci est venu s’ajouter le (re)confinement, que j’ai accueilli avec soulagement. Plus besoin de courir les médecins pour me faire arrêter (impossible pour moi de prendre les transports en commun avec ma gerbe). Le boulot m’a fait livrer un ordinateur (je n’avais rien demandé mais j’en suis ravie). Lucien est confiné avec moi. Danette aussi of course. Même scénario qu’en début d’année : on prend ça à la cool, en essayant quand même de s’organiser un minimum puisqu’on a un déménagement prévu pour janvier (si tout va bien) ! La grosse différence, c’est que cette fois je suis enceinte … J’attends sagement mon échographie officielle du premier trimestre (qui aura lieu dans un peu moins de trois semaines).

J’ai chaque jour une grosse pensée pour toutes les nanas du forum qui voient leur FIV DO reportée. Et pour toutes les PMettes qui vont devoir encore patienter. Courage. ❤

La relève !

Après le dernier rendez-vous avec Madame-Hope, il a fallu trouver un(e) new gynéco. Spécialisé(e) gynécologie-obstétrique of course. Dans ma ville il n’y a que deux vieux croulants qui ne m’inspirent pas du tout et je n’ai pas envie de devoir me traîner jusqu’à Paris. Je fouine sur Doctolib jusqu’à tomber sur une nana à Saint-Germain-en-Laye qui n’a que des bons avis sur Google.

La secrétaire est très sympa. Les locaux sont chics. La gynéco a des cheveux gris non teints, un pull rose poudré et des baskets du même ton. Elle est super cool. Le feeling passe tout de suite bien. Elle comprend que je suis une newbie de la grossesse un peu larguée et dépassée par la gerbe.

45 kilos sur sa balance. « C’est votre poids normal ? » Ah non, il manque 2 ou 3 kilos. La gerbe, encore elle. Mais surtout j’ai du mal à boire. Elle m’explique que l’équilibre alimentaire on s’en fout totalement au premier trimestre, et que je peux me nourrir exclusivement de fromage râpé et de Coca s’il n’y a que ça qui passe. Spéculum, un coup d’œil au col. Puis échographie rapide … sur le bide ! On voit le cœur qui palpite, elle me met le son. Palpation des seins. Tout est Ok !

La suite : un rendez-vous par mois + les trois échographies officielles jusqu’au 7ème mois de grossesse environ. Ensuite c’est la maternité qui prend le relai. Elle me rassure d’ailleurs sur mon choix : ses patientes qui ont accouché à Nanterre en sont toutes ressorties très satisfaites. Ouf, au moins ça c’est un sujet clos !

En cas de nouveaux saignements, je téléphone et elle me cale un rendez-vous en urgence. Pas d’arrêt de travail (cette fois-ci je lâche l’affaire ; je retourne au bureau lundi) : tout va bien et je ne vomis pas 20 fois par jour. Entre le MATERNOV, le PRIMPERAN et le DONORMYL je suis plus qu’équipée selon elle.

L’échographie « de datation »…

« sert à précisément dater le début de la grossesse ». Bon quand on est en FIV il y a peu de suspense sur les dates ! Pour Lucien et moi, c’était surtout le dernier rendez-vous avec Madame-Hope (qu’on aime bien, mais qu’on est pas mécontent de quitter après toutes ces années). On parle de notre passage aux urgences de Poissy (apparement réputées pour être assez moyennes), elle note notre date de transfert de ponction / début de grossesse. Et c’est parti pour l’écho. Lucien prend place à côté de moi (toujours aucune intimité chez Madame-Hope, alors qu’aux urgences ils prennent soin de te mettre une serviette sur le ventre / les jambes) (même si ton mec n’est pas là) et notre embryon apparait sur l’énorme écran. Il est mois en gros plan qu’à Poissy, du coup on ne voit le petit coeur qui palpite. Mais on l’entend ! Elle note un petit hématome ; les saignements s’expliquent par l’adénomyose, l’utérus qui se contracte et les connexions entre utérus et embryon qui se fond parfois à côté de la plaque (d’après ce que je comprends) (mais entre le masque et la nausée, je suis H24 un peu à l’ouest).

Madame-Hope m’arrête généreusement durant dix jours et balaye toutes mes questions : jusqu’à l’échographie du premier trimestre, pas de sport ni de rapport sexuel. Je me perds dans les examens à faire (prises de sang, trisomie 21, test du diabète, échographies) et les noms des professionnels qu’elles me conseillent. C’est là que je réalise que je ne sais toujours pas quel est le parcours classique une fois passées les prises de sang après le transfert … Elle me pond un calendrier de grossesse contenant même mes dates de congé maternité ! Et nos repartons avec deux clichés de notre embryon. ❤

« À dans deux ans ! » Sous-entendu : pour notre deuxième enfant. Voilà ce que je lui dis quand nous nous disons au revoir. Elle me répond : « Soyez sage ! » Les masques cachent la moitié de notre visage mais il y a une émotion particulière dans l’air.

J’ai testé … les urgences gynéco de Poissy !

22 heures. Injection de PROGIRON. Je me lève du canapé. Quelque chose coule. Du sang. Bien rouge celui-ci. Je maile Madame-Hope et j’appelle dans la foulées les urgences gynécologiques de Poissy. La nana au téléphone me dit (en gros) : « Si ça saigne comme des règles et que tu as mal à 5 sur 10, viens. Sinon attends demain. »

Dix minutes plus tard, ça saigne de plus belle. J’ai mal. On décide de partir aux urgences. En me préparant, je manque de tomber deux fois dans les pommes. Lucien compose le 15. On nous envoie une ambulance. Je descends les escaliers portée sur une chaise.

Je suis trimballée jusqu’à Poissy avec l’impression d’être dans un mauvais rêve. Il pleut sur ma gueule quand on me sort de l’ambulance. Couloirs vieillots, photos de nouveau-nés aux murs. Deux (demi-)visages plus sympas que ceux des ambulanciers m’accueillent quand s’ouvre la porte du service. Je craque.

Une aide-soignante fait mon admission. Lucien se fait recaler à l’entrée. Procédure Covid-19. Pipi dans un pot. J’attends qu’un « box » se libère. Il n’y a que des meufs bien en cloque. Avec leur mec. Et moi solo sur un fauteuil dans un couloir.

L’horloge dépasse minuit. Ça y est, nous sommes le 13 octobre. Pile un mois après le transfert. L’externe me fait entrer dans un fameux box et me pose des questions. Puis j’attends l’interne pour l’examen. Alone again.

2 heures 20. L’infirmière passe deux fois pour voir si je ne me suis pas enfuie. Elle m’apprend que les médecins ne sont pas là. Ils sont tous en « salle de naissance » pour des « urgences vitales ». Je savais bien que je n’avais rien d’une urgence, voilà pourquoi j’étais réticente à l’idée de venir ici. J’ai froid. Impossible de se reposer, je suis assise sur une chaise.

5 heures. L’externe revient enfin avec l’interne. Spéculum. Le sang ne vient pas du col. Échographie. Elles ne disent rien. Je me dévisse la tête pour apercevoir l’écran, alors seulement l’interne me parle. Je vois mon embryon, sorte de petite cacahouète. Elle me montre une partie qui frétille. « On voit une activité cardiaque. » Elle me dit – enfin non : je pose les questions et elle me répond – qu’il est bien situé et que sa taille est correcte pour son âge, voire qu’il est « en avance ». Elle ne trouve aucune explication aux saignements. Elle ne voit pas de décollement. Je dois continuer à mener une vie normale. « Les saignements sont fréquents au début de la grossesse. »

On rentre chez nous à 6 heures du matin. Je n’ai même pas de cliché à montrer à Lucien. Juste un papier qui contient quelques mots rassurants.

Sac mesurant 36 mm et contenant 1 embryon de 9 mm AC+.
Conclusion : GIU évolutive

Le cliché de la meuf en cloque épanouie.

C’est un mythe nan ? Une légende urbaine ? Ou alors ça arrive après les fameux trois mois ?! Rassurez-moi ! Non parce que là je suis une larve. PRIMPERAN saves my life pour la gerbe, mais je suis toujours en vrac. Fatiguée, molle, sans énergie (même écrire ici me demande un énorme effort de concentration). À passer mon temps à manger des trucs gras et salé. Le délire des envies de fraises ça aussi ça doit être du mytho d’ailleurs.

Demain ça fera un mois que je n’ai pas couru. J’avais d’ailleurs symboliquement jeté à la poubelle mes baskets après mon dernier footing, juste avant de prendre l’avion pour la République Tchèque. Je ne peux pas vraiment dire que ça me manque, parce que je suis tellement à plat que je n’ai aucune envie d’aller courir … Mais depuis 33 ans et des bananes j’ai la chance d’être habituée à vivre dans un corps silencieux, qui va bien et dans lequel je me sens épanouie et belle (la plupart du temps). Ça me donc fait très bizarre de me sentir « mal » à longueur de journée. Je sais que c’est pour « la bonne cause », mais ce serait mentir de dire que je vis parfaitement bien ces changements. D’autant plus que 32k est aux abonnés absents silencieux. Pour me rappeler sa présence, j’ai mes patchs sur le bide et mes deux injections de PROGIRON par jour. Mais c’est tellement impalpable, abstrait, nébuleux.

J’entends souvent dire : « J’ai adoré être enceinte. » À l’heure actuelle, je ne comprends pas. Ça me désole, ça me culpabilise et ça m’inquiète.

Voilà. C’était l’instant bureau des plaintes. [Feel free to unfollow me.] 😉 Mais si tu as un témoignage rassurant (ou pas) à m’apporter, ça me ferait plaisir de me sentir moins seule le lire.

1 mois !

C’est aujourd’hui l’âge de 32k (a.k.a. l’embryon dans mon corps). Il y a un mois, Lucien découvrait (seul) REPROFIT. Ça me parait être à des années-lumière. En d’autres chiffres, je suis à 6 SA + 2 jours. [Ce lien est super pratique.]

32k ne m’a fait aucune nouvelle frayeur sanglante (à 2 injections de PROGIRON par jour, j’espère qu’il kiffe son taux de progestérone). Au contraire, il se montre très rassurant en m’offrant la gerbe à longueur de journée. Ah bah tu l’as voulu hein ! Mouai. J’ai réservé l’acupuncteur demain (pile un mois après mon premier rendez-vous), puisque le gingembre et la menthe n’ont pas l’air très efficace. Le DONORMYL soulage un peu, mais il m’endort … Si je le pouvais, j’hibernerai chez moi sans voir personne jusqu’à ce que ça passe. Le taff me fout un stress inutile et en ce moment je ne suis vraiment bonne à rien (zéro concentration, zéro énergie, zéro envie … comme une dépression dont l’unique cause serait un état nauséeux constant). Mais ma doc Madame-la-grossesse-n’est-pas-une-maladie n’est pas de cet avis. Mon arrêt de travail se termine demain, et j’ai déjà calé un rendez-vous avec un autre généraliste. Je compte bien jouer sur sa pitié le facteur « poids » : à ce rythme je serai bientôt sous les 45 kilos. Et c’est pas bien lourd, même quand on ne mesure qu’un mètre 60.

On est donc bien loin du cliché de la femme enceinte épanouie, même si visiblement c’est un peu le lot de toutes durant les trois premiers mois (et parfois plus) (mais je refuse d’en entendre parler) (pour le moment).

Fin de l’alerte. Pour le moment !

10 heures. La secrétaire de Madame-Hope au téléphone. « Dites-moi tout ! » Elle me rassure. Saignements marron : il ne faut pas s’inquiéter. Rouge vif : je rappelle illico et on avancera la date de l’écho. Pour le moment, direction le laboratoire pour une prise de sang bêta-HCG et progestérone. Heureusement que Lucien est en télétravail parce que je n’en mène pas large. Aller-retour express en voiture. La nana de l’accueil me dit que les résultats ne seront pas dispo avant demain et me conseille d’aller aux urgences. Mais je suis là, alors autant y rester. Et je fais bien : la dame qui me pique – exaspérée par l’incompétence de sa collègue – m’assure que les résultats seront dispo dans la journée. Elle rajoute une couche de « rassurance » quand je lui explique ma situation dans les grandes lignes. Cœur sur elle !

Je passe le reste de la journée sur mon canapé, à dormir, manger et glander. Incapable de me concentrer sur quoi que ce soit. J’ai mal en bas des abdos et je n’aime pas du tout ça.


16 heures. Je suis au téléphone avec ma boss qui me rajoute une éventuelle mission pour compléter mon temps partiel. En parallèle les RH me demandent de solder mes heures supp avant fin 2020. Normal …
Mail du labo. Mon cerveau décroche instantanément des conversations en cours.

Oh putain. C’est énorme. Ça fait plaisir.
La progestérone par contre « est un peu basse ».

Je rappelle mon traitement en cours et les quasi deux heures de trajet par jour pour le travail en demandant si un arrêt est nécessaire. Réponse sans appel :

Madame-Hope vous demande de faire 2 injections de PROGIRON par jour à 12 heures d’intervalle (et vous arrêtez les ovules). En ce qui concerne l’arrêt de travail, prenez rendez-vous avec votre médecin traitant pour le faire.

La ruine en PROGIRON ! Et ma généraliste va adorer me revoir pour faire la paperasse dont la gynéco ne veut pas s’embarrasser … Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?!

Panique à bord !

Lundi matin. Dans mon protège-slip, ma progestérone de la nuit à une couleur maronnasse qui ne me dit rien qui vaille. « Bonjour Madame-Hope. Je saigne ce matin. Que dois-je faire ? Je vous remercie pour votre aide. » Je signe en tremblant oubliant une lettre à mon prénom. Les copines me conseillent de me rendre aux urgences gynécologiques. Dans ma tête tourne en boucle « mais c’est trop tôt, on ne peut rien faire encore ». Je mets ma progestérone et je m’allonge, bien décidée à ne pas bouger en attendant la réponse de Madame-Hope. J’actualise ma boite mail comme une possédée. J’ai mal au bide putain.

Brûler les étapes !

La blague : j’ai déjà trouvé ma maternité. Je galérais avec ce choix prise de tête et trop prématuré à mon goût. Et puis finalement c’est une ex-PMette (qui m’a fait cadeau de quelques fioles de PROGIRON) qui m’a soufflé un nom que je n’avais encore jamais croisé dans mes recherches. Ça collait bien avec mon délire (je n’en suis pas encore à parler « projet de naissance » hein) alors je me renseigne. C’est bien ça que je veux. Je décroche mon téléphone. Ce premier contact se passe super bien. De la même façon que j’avais choisi REPROFIT – au feeling – j’ai choisi ma maternité. Premier rendez-vous fin novembre.

Une heure plus tard, email de Madame-Hope : rendez-vous « de contrôle échographique » le 15 octobre.